Velo-City 2022: Qui n’avance pas recule

Jean-François Rheault
Le 7 juillet 2022
JFRSLV

Après une annulation en 2020 et une version hybride en 2021, la grande conférence Velo-City signait son retour dans sa formule habituelle en juin dernier à Ljubljana, capitale de la Slovénie. Fort de cette grande accélération du vélo pendant la pandémie, le progrès était visible à travers les différentes présentations animées par des intervenants venant de partout dans le monde. Au-delà des leaders habituels comme Amsterdam et Copenhague, plusieurs villes ont offert de grandes présentations inspirantes quant à la place du vélo comme outil de mobilité et vecteur de changement social.

Une ville hôtesse d’exception

Il faut le dire : la ville de Ljubljana en Slovénie est un joyau. Avec une population de 280 000 habitants, la capitale du pays a fait un choix audacieux en 2007 en piétonisant son centre-ville. À l’époque, seulement 40 % des résidents étaient en faveur de ce projet. À travers différentes évolutions et adaptations, c’est maintenant plus de 17 hectares qui sont accessibles aux piétons et aux cyclistes. Aujourd’hui, plus de 97 % de la population appuie ces grands changements qui ont rendu la ville bien plus agréable à l’échelle humaine. Bien évidemment, maintenant que tout est en place, personne ne pourrait imaginer un retour en arrière.

Ce succès s’explique principalement par la volonté politique et le partage d’expérience avec d’autres villes à travers le monde, ce qui a permis de concevoir un centre-ville adapté aux besoins et habitudes de vie de ses résident.e.s. Quant à la cohabitation piétons/cyclistes, elle est plutôt heureuse. En adoptant une approche similaire à l’Avenue du Mont-Royal à Montréal, le partage de l’espace vise à favoriser les bons comportements et responsabiliser ses utilisateurs plutôt que de limiter les accès en segmentant les espaces selon le mode de transport.

La France, bientôt première destination mondiale de tourisme à vélo ?

Parmi les éléments les plus marquants de la conférence, l’accélération des infrastructures vélo en France fut certainement impressionnante. D’un côté, la Fédération française des usagers de la bicyclette a déployé plusieurs programmes dans les dernières années. Que ce soit pour l’enseignement du vélo dans les écoles, la formation professionnelle en mobilité active, le stationnement vélo ou même la subvention à l’achat ou l’entretien de vélo, les investissements en matière de pratique cycliste connaissent en France un essor grandiose. Au total, c’est d’un budget de plus de 300 M d’euros qui a été mis en place depuis 2020 afin de soutenir le vélo.

Du côté des collectivités, le travail de Vélo et territoires est digne de mention. La mise en valeur des données à travers ses différents observatoires permet de bien comprendre l’accélération du vélo sur le territoire. À tel point que la France s’est fixée comme objectif de devenir la première destination mondiale du tourisme à vélo. À ce sujet, la directrice de l’association est claire : « il faut mesurer son succès touristique autrement et cesser de seulement mesurer le succès par les touristes qui arrivent en avion. Il faut démontrer l’importance du tourisme domestique. ». Voilà quelques pistes de réflexions pour le Plan d’action pour un tourisme durable et responsable du Gouvernement du Québec.

La résistance au changement, une affaire planétaire

À travers les différentes présentations et prises de parole d’élu.e.s, le thème de l’opposition est revenu à plusieurs reprises. Le retrait de l’espace pour les voitures attise les passions. D’une ville à l’autre, les histoires sont semblables : peu importe la taille du plan, les attaques et les menaces sont féroces. Heureusement, on constate que les élus qui gardent le cap réussissent toujours à faire avancer le bien commun dans leur ville.

Dans ce contexte où la résistance est égale peu importe le plan, l’ambition est donc la meilleure avenue. Sigrid Z. Heiberg, élue au conseil municipal d’Oslo, y est d’ailleurs allée d’une citation colorée : « Il y aura de l’opposition mais les villes doivent évoluer même si les vieux monsieurs ne changent généralement pas leurs opinions! ». L’élu responsable de la mobilité à Ghent en Belgique était d’ailleurs catégorique : il faut inclure le vélo dans tous les projets pour faire avancer les choses.

En quittant Ljubljana, le bilan était clair : le vélo progresse partout. Il ne s’agit pas seulement d’un mouvement, d’une cause, d’exemples isolés; le vélo s’impose comme une des solutions les plus évidentes à une foule d’enjeux de société cruciaux qui vont des changements climatiques à l’étalement urbain, en passant par la santé physique et psychologique de la population. C’est pour ça que le vélo progresse partout, et que les endroits qui choisissent de ne pas s’inscrire dans ce progrès ne peuvent que reculer.

 

Jean-François Rheault

Président-directeur-général de Vélo Québec

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